A quoi sert le rêve ?
Le rêve est le gardien du sommeil
- Dr Sigmund Freud
Le rêve a une fonction régulatrice et réparatrice. Il agit sur l'élaboration de la mémoire, la créativité, la gestion des émotions,
la résolution des problèmes, et surtout il est une formidable machine à produire des solutions. En effet, pendant que le corps endormi
se régénère, le cerveau fait du rangement, trie les informations subliminales collectées pendant la journée dans l'inconscient. Le
cerveau livre son compte-rendu sous forme de songe. Le rêve est donc une espèce de photographie du psychisme, qui à la fois fait état
d'une situation et montre des solutions. Un songe est un guide, il tend à corriger une manière de penser ou de se comporter, en vue de
rétablir l'équilibre du sujet. Il fait le lien entre un état de santé, ses racines ou ses conséquences intimes, et ses répercussions
dans la vie sociale. Le rêve est un ouvrier du bien-être, pourtant il est dénigré par la société et par le rêveur lui-même.
Pourquoi mon rêve est-il étrange ?
Les symboles de nos rêves sont les messagers indispensables qui transmettent des informations de la partie instinctive
à la partie rationnelle de l'esprit humain.
- Dr Carl Gustav Jung
Lors du sommeil paradoxal, le sujet est coupé du monde extérieur. Les perceptions sont désactivées, le corps perd son tonus et l'activité
cérébrale se fait plus intense (le nourrisson est plongé dans le sommeil paradoxal les trois-quarts de la journée). Le corps étant passif,
le mental se met en off, et c'est la capacité d'abstraction qui prend le relais. L'esprit fournit ainsi son « rapport » sous forme de rêves
qualifiés d'énigmatiques dans la mesure où il ne suivent pas la logique d'un raisonnement traditionnel. C'est pour cela qu'on pense à tord
« c'est n'importe quoi ! ». La psychologie du rêve est analogue à celle du conte : il prend des chemins détournés pour raconter une histoire
mettant en scène des personnages-types hautement symboliques – Carl.G.Jung les appelle les « archétypes » - une histoire vouée à une
interprétation. Les éléments d'un rêve, qu'ils soient des objets ou des êtres, personnifient un désir, une pulsion, une intuition, une
idée refoulée qui a besoin de se déguiser pour être acceptée par la conscience de son auteur, soit parce qu'il n'est pas prêt à l'assumer,
soit parce qu'il n'arrive pas à mettre le doigt dessus avec ses schémas de pensée habituels.
Un rêve peut-il être prémonitoire ?
...les songes passent comme les esprits du passé, et parlent comme les sibylles de l'avenir...
- Lord Byron
J'entends souvent « est-ce que tu crois aux rêves prémonitoires ? » Cette question n'a pas de sens. Un rêve est nécessairement prémonitoire puisque
son rôle est de prévoir donc de pré-dire ce qui va nous arriver si on poursuit dans telle ou telle voie (Jung l'appelle la fonction d'anticipation du rêve).
Ceci dit, pas de panique ! Hors de question de prendre le rêve au pied de la lettre ! Les personnes vus en rêve ne sont pas les originaux mais des symboles.
Rêver de voir mourir un être cher par exemple n'annonce pas sa mort prochaine. Il y a de grandes chances pour que cette personne incarne dans le rêve une
attitude que l'on doit modifier ou une phase qui prend fin... L'esprit effectue la nuit un travail de synthèse, de psychanalyse (« analyse de la psyché »),
de bilan, il passe en revue les probabilités. C'est pourquoi, souvent, au réveil, on a la solution à un problème de la veille et qu'après une bonne nuit de
sommeil, les choses semblent plus fluides, on prendra plus facilement une décision. Un rêve est en quelque sorte le produit d'un algorithme complexe, un
algorithme à détecter des désirs et à produire des solutions. Libre à nous ensuite d'agir, de mettre en place une stratégie, de nous préparer à relever les
défis qui se profilent.
L'onirologie : une pratique millénaire
Les rêves sont une nécessité biologique et forment une fonction d'intégration et de récupération aussi importante que nos grandes fonctions physiologiques.
- Pr Pierre Magnin
Tout le monde rêve, toutes les nuits. Pourtant vouloir interpréter son rêve passe pour de la superstition.
La fonction physiologique du rêve était connue pendant des siècles avant un petit millénaire d'obscurantisme...
Dans l'Antiquité, médecine et rêve sont intrinsèquement liés. On sait que les rêves créent un pont entre le psychique
et le somatique, qu'ils permettent de remonter à l'origine d'un trouble. A partir du Ve siècle avant notre ère, en Grèce,
les malades sont accueillis dans des centres médicaux appelés « temples d'incubation », sortes de maisons de repos où la prise
en charge commence par une thérapie par le rêve. Le plus connu est le temple d'Epidaure, dédié au dieu de la médecine Esculape
(Asclépios en grec, Aesculapius en latin). Des couleuvres squattent le temple et circulent entre les dormeurs (l'espèce s'appelle
d'ailleurs « couleuvre d'Esculape »)... Le corps médical emprunte depuis le XIXe siècle l'emblème d'Esculape: le bâton autour duquel
s'enroule une couleuvre. Récupération assez cocasse dans la mesure où la médecine moderne méprise l'onirologie... Mais sans le serpent,
le logo aurait, certes, moins de cachet.
L'empire romain développe cette pratique et des centaines de temples d'incubation sont construits. Ainsi pendant 1500 ans au moins,
l'onirologie est un outil d'aide au diagnostique et au soin, et je suis sûre qu'un jour où l'autre, que ce soit dans 10 ans ou dans 100
ans, nous y reviendrons. Le serpent du logo patiente, il guette le moment opportun pour secouer le caducée (et donc le logo deviendra un
serpent avec un hochet ?).
Les monothéismes du moyen-âge et leur politique d’éradication du paganisme doivent discréditer le rêve. Pour cela, ils font appel au
diable : les rêves deviennent des productions diaboliques. Au XIIe siècle, l'Inquisition interdit l'onirologie au nom de la lutte contre la sorcellerie.
Il faut attendre 1899 et la publication de L'Interprétation des rêves du neurologue autrichien Sigmund Freud, pour qu'un retour au rêve soit amorcé.
Le fondateur de la psychanalyse, en prouvant l'existence de l'inconscient, fait revenir le rêve dans la médecine. Freud introduit les notions
de « contenu manifeste » pour désigner le récit du rêve, et de « contenu latent » pour désigner son message caché. Le psychiatre suisse Carl
Gustav Jung va plus loin, en ajoutant la notion d'« 'inconscient collectif ». En effet, si le rêve naît dans l'inconscient du sujet
- un coffre fort gardant la mémoire infantile et les désirs refoulés (Freud) - il fait appel à des codes, des « archétypes » (Jung)
partagés par l'ensemble de l'humanité et que les générations se transmettent (de même qu'on hérite de gènes, on hérite de paramètres psychologiques).
En 1961, le neurologue français Michel Jouvet découvre le sommeil paradoxal, et ouvre la voie à une nouvelle étude scientifique du rêve. Depuis on
sait que l'activité onirique ne se réduit pas à la phase du sommeil paradoxal. Les avancées technologiques donnent aujourd'hui à la science les
moyens de prouver que le rêve est vital, et les études scientifiques récentes (2018) corroborent le bon sens des anciens : l'activité onirique
consolide la mémoire, booste la créativité, optimise la recherche de solutions, favorise la « digestion » des événements et la régulation des
émotions... En terme de connaissance du cerveau, la science n'en est qu'à ses débuts et les découvertes à venir promettent d'être passionnantes !
(Je ne tiens pas à faire un cours, d'autres l'ont déjà fait mieux que moi. La théorie est le domaine des spécialistes et des universitaires, moi
je suis praticienne. Pour aller plus loin, vous pouvez vous intéresser à l’œuvre d'Hippocrate, d'Aristote, de Sigmund Freud, de Carl Gustav Jung
et de Michel Jouvet. Les auteurs contemporains sont plus accessibles. Je me dois de rendre honneur aux trois livres dont la lecture m'a encouragée
dans mon intuition et convaincue que j'avais quelque chose à apporter aux rêveurs :
Les Secrets de vos rêves, de Tobie Nathan (2016). L’ethnopsychiatre Tobie Nathan partage son expérience d'onirocrite au sein du journal Psychologies Magazine.
Il recevait les rêves des lecteurs.
[le rêve] s'impose à l'esprit comme une réponse à une question que l'on ignore.
- Tobie Nathan
ABC de la symbolique dans les rêves, de Corinne Morel (2005). Une initiation au travail interprétatif avec un lexique des symboles oniriques non exhaustif.
En fait, le sujet a souvent la solution à ses problèmes, connaît la réponse à ses questions, sait ce qu'il doit ou ce qu'il va faire.
Mais ces connaissances sont enfouies dans les profondeurs de sa psyché, dans son inconscient. Le rêve, puisant justement dans l'inconscient,
les rend accessibles, du moins après l'interprétation, c'est-à-dire une fois opéré le passage du contenu manifeste, le souvenir du rêve, au
contenu latent, le message du rêve.
- Corinne Morel
Sommeil et rêves, du Docteur Jean-Michel Crabbé (2003). En tant que médecin généraliste, Jean-Michel Crabbé a expérimenté à quel point le rêve peut servir le médecin.
Un grand nombre de maladies sont psychogènes, déclenchées par des facteurs inconscients qui désorganisent les rythmes biologiques et les régulations
centrales des grandes fonctions vitales. Ainsi l'analyse des rêves a une utilité diagnostique et thérapeutique, elle peut devenir une discipline à part
entière et notre médecine moderne pourrait très bien être complétée par un traitement psychique des maladies basé sur l'étude des rêves.
- Dr Jean-Michel Crabbé
Pourquoi se souvient-on de ses rêves ?
Il faut savoir se prêter au rêve lorsque le rêve se prête à nous.
- Albert Camus
La plupart du temps on ne s'en souvient pas, ce qui veut dire que le cerveau a bien fait son travail nocturne, que le message a été reçu et intégré. Lorsqu'on se
souvient d'un rêve, c'est qu'on n'a pas réussi à le comprendre par soi-même. On doit alors chercher à le « décoder ». Or lorsqu'on est réveillé, que le corps est actif,
notre état rationnel et pragmatique reprend les commandes, nous empêchant d’accéder au message crypté du rêve. Je suis là pour décrypter vos rêves, mon travail est
semblable à celui du serrurier qui vous ouvre la porte quand vous ne réussissez pas à mettre la main sur vos clés.
Quels rêves sont importants ?
Apprenons à rêver, mais gardons-nous de rendre publics nos rêves avant qu'ils n'aient été mis à l'épreuve par notre esprit bien éveillé.
- Friedrich August Kekulé
Vous vous demanderez peut-être quels rêves méritent une attention accrue. Bien entendu, si certains sont fondamentaux (le plus connu étant le rêve de Kekulé qui
trouva la formule cylindrique du benzène en rêvant à un serpent qui se mord la queue) d'autres sont plus accessoires. J'ai envie de dire : faites vous confiance.
Un rêve important se sent, souvent il choque, il y a le désir de rester dans son monde quand le réveil sonne, puis une urgence à le raconter, et il revient à l'esprit
plusieurs fois dans la journée, s'accompagnant de sentiments forts aussi bien négatifs (culpabilité, inquiétude, dégoût...) que positifs (curiosité, enthousiasme, illumination...).
A noter : certains médicaments (somnifères, anti-dépresseurs, anti-psychotiques, anxiolytiques...) et les drogues bloquent le sommeil paradoxal ainsi que les rêves.
Interpréter ses rêves pour ne plus perdre de temps
Le rêve est la preuve qu'imaginer, rêver ce qui n'a pas été, est l'un des plus profonds besoins de l'homme.
- Milan Kundera
Ignorer ses rêves revient à refuser un coup de main gratuit et bienvenu, à censurer son esprit. Un rêve a souvent un conseil empli de sagesse à nous apporter, qui peut nous faire
gagner beaucoup de temps, voire quelques séances de psychanalyse... On peut ignorer un rêve, on finira de toute façon par réaliser ce qu'il souhaitait nous dire, par la force des
choses, mais on aura perdu du temps, de l'énergie et on aura peut-être fait des erreurs qu'on aurait pu éviter. Interpréter ses rêves c'est commencer à se respecter, renouer avec
son intuition, se lancer dans une activité nouvelle et passionnante, et découvrir qu'on porte, en soi, les solutions aux difficultés que l'on rencontre.
Cauchemars et rêves récurrents
Il est bon de pourchasser des rêves mais mauvais, comme cela finit généralement par arriver, d'être pourchassé par eux.
- Franz Kafka
Un cauchemar ou un rêve récurrent est un échec du psychisme à nous faire comprendre quelque chose. En effet, en nous envoyant des images choquantes il veut nous faire réagir, et il
continuera d'insister tant qu'on ne l'écoutera pas, provoquant des réveils fréquents, un état d'irritabilité, des insomnies... Je suis là pour vous aider car il est fastidieux de
s'auto-analyser tout en restant objectif. Comme pour toute pratique expérimentale, la subjectivité est source d'erreurs. Vous seriez tenté de vouloir lire le rêve à votre avantage,
de retenir d'un symbole la signification qui vous arrange sans vous en rendre compte, de forcer la théorie, et vous passeriez à côté, renforçant le déni ou l'aveuglement. Un œil
extérieur permet de mettre le doigt sur ce qui est devant soi et qu'on ne voit pas. Lorsque le message est reçu, la relation entre la conscience et l'inconscient est apaisée, le rêve
cesse de revenir et le sommeil se rétablit.
On ne rêve pas pour rien !
Un rêve est un souhait que votre cœur fait, quand vous dormez profondément.
- Walt Disney
La première fois que quelqu'un me confie un rêve, il est toujours surpris par la pertinence de ce qu'il prenait pour un simple conte, bricolé par son cerveau en veille... La
désorganisation apparente du songe disparaît lorsqu'on tient sa logique. Un rêve n'est jamais anodin, il est précis. Il est un cadeau visant à débloquer une situation que son
auteur traverse. Ce qui m'interpelle, c'est bien cette surprise chez l'autre, ce scepticisme préalable. En effet, si on ne dort pas pour rien, on ne rêve pas pour rien. L'être
vivant est une machine perfectionnée où rien n'est laissé au hasard. Rien, ni dans le corps, ni dans le cerveau n'est inutile. Aussi, je n'arrive pas à comprendre comment il peut
être communément admis que les rêves ne servent à rien. Comment autant de gens – qui ne se sont jamais intéressé au sujet - peuvent sérieusement croire cela, alors qu'ils rêvent
tous ? C'est comme dire que les ongles, les orteils, l'odorat ne servent à rien... Je n'arrive pas à comprendre comment on a pu en arriver là. Rien n'existe pour rien dans la nature.
De même qu'il n'y a pas une seule espèce dans une forêt qui ne soit indispensable à sa survie, de même le rêve est nécessaire à l'équilibre de l'être, du vivant. Et j'espère que
l'évolution de l'homo sapiens sapiens lui réservera de se reconnecter avec sa part magique, avant qu'il n'ait, par froid calcul, rasé la forêt...
Conseils pour se souvenir de ses rêves
- Gardez un carnet sur votre table de chevet ou à côté du grille-pain, afin de noter vos rêves au saut du lit ! Il faut écrire le plus honnêtement possible, sans chercher à reconstituer
une trame, même si (et surtout si) le scénario a l'air totalement dénué de sens. Un rêve ressemble à une nouvelle fantastique qui se termine en queue de poisson, à un tableau
surréaliste... L'absurde a sa place.
- Quelque chose qui marche très bien aussi, si on n'a pas le temps de le rédiger immédiatement, c'est de le raconter à son ami(e), ses enfants, parents, colocataires, collègues de travail...
avant midi ! Raconter à voix haute permet de fixer le rêve (d'ailleurs c'est à ça que sert la machine à café au bureau, vous l'ignoriez ?). Si vous tardez trop il perd en précision et c'est
comme si vous soumettiez à l'interprète un texte à trous...