Les parents intérieurs – Carl Gustav Jung

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L’importance du travail sur les parents intérieurs en psychologie analytique est bien exprimé par Carl Gustav Jung dans son livre Psychologie de l’inconscient. Il écrit :

« La thérapie ne commence qu’à partir du moment où le malade se rend compte que ce ne sont pas son père et sa mère qui lui barrent la route, mais que c’est lui-même, c’est-à-dire une partie inconsciente de sa personnalité, qui prolonge et perpétue le rôle du père et de la mère. »

Nous allons aujourd’hui développer cette phrase centrale en analyse jungienne afin que vous puissiez vous rendre compte à quelle point elle est importante et comment, une fois qu’on a compris ça, on peut faire évoluer nos parents intérieurs, afin qu’ils correspondent à notre niveau de maturité et à nos désirs de progression.

parents intérieurs

L’importance des parents dans la construction du Moi

“N’allez pas creuser du côté de mes parents : ils n’y sont pour rien !”

Il arrive souvent en début d’analyse que les personnes m’avouent : “J’ai un a priori vis à vis de la psychanalyse et une certaine méfiance. Si vous cherchez du côté de mes parents pour m’expliquer mes difficultés, ça ne va pas me plaire, car je respecte beaucoup mes parents.”

En effet, l’analysant vient en analyse avec une attitude ambivalente. C’est normal, l’ambivalence est présente dans chacune de nos démarche, et encore plus dans nos tentatives d’aller mieux.

L’ambivalence qu’est-ce que c’est ? C’est l’attitude consistant à dire je veux / mais en même temps je ne veux pas. Je veux dire / mais je ne veux pas avouer. Je veux comprendre / mais je ne suis pas sûr d’être prêt à regarder. J’ai tel désir / mais je ne suis pas prêt à le regarder. J’ai telle difficulté / mais je ne suis pas capable d’identifier dans quelle mesure elle vient de moi…

L’ambivalence est une donnée nécessaire en psychologie car l’être humain est complexe et c’est sa complexité qui fait sa richesse. Ainsi l’ambivalence s’exprime souvent de cette manière en début d’analyse : “Je sais bien que je vais devoir parler de mes parents, mais je ne veux pas dire du mal d’eux.”

L’intention est belle : elle est mue par une volonté affichée de respect de ce qui a été transmis, mais plus inconsciemment d’une loyauté vis à vis du système familial. Or tout conflit de loyauté est compliqué à désamorcer.

D’un autre côté, si une personne s’adresse à un psychanalyste, quelle que soit sa sensibilité dans l’approche (freudien, lacanien, jungien ou autre), il sait qu’il lui faudra parler de ses parents. Car l’analyse n’est pas une thérapie brève, son objectif est une compréhension profonde de son propre mode de fonctionnement dans le but de se libérer des comportements et schémas qui nous causent du souci et de mieux se connecter à ses besoins. Or ce mode de fonctionnement prend racine dans l’enfance. Il est donc incontournable de ne pas aller regarder dans l’enfance les graines qui ont été semées dans la personnalité.

parents intérieurs 2

L’enfant construit son moi sous la supervision du couple parental – bientôt le modèle de ses parents intérieurs

S’il n’a pas de parents, ou s’il lui en manque un, d’autres adultes auront fait le job. L’enfant se construit donc sous le regard de ses adultes référents qui automatiquement vont devenir les premiers supports au modèle de parents qu’il aura, et donc au modèle de ses parents intérieurs, c’est à dire à l’influence parentale sur le plan de sa psyché.

Aussi en début d’analyse, les premières séances sont consacrées au travail d’anamnèse. L’anamnèse est la phase où la personne va raconter son histoire à l’analyste. Ainsi, l’analyste va pouvoir entrer dans son univers, dans son petit monde, étant donné que chaque individu est un monde en soi.

A ce stade, l’analyste ne dirige presque pas la séance, il écoute, il s’imprègne, il commence à faire des liens. Il découvre la “carte” de la personne. Mais la carte ne fait pas le territoire comme dit l’expression. La carte, c’est le discours de la personne, son histoire avec le sens qu’elle donne à son histoire et à l’imbrication des événements qui l’ont construite.

Si les parents ne sont pas évoqués, si l’analysant a du mal à s’ouvrir sur ces sujets là, par gène, par respect, par loyauté, ou quel que soit l’a priori qui l’en empêche, il va falloir attendre le bon moment pour y revenir, en douceur, au fil des séances, et aller chercher les infos qui se font jour dans ses silences.

C’est important pour l’analyste de comprendre le rôle des parents, ou des adultes qui se sont substitués aux parents et qui ont rempli les fonctions parentales. Ca lui permet de comprendre dans quel environnement l’analysant a grandi, s’est épanoui. De quel manière est-ce qu’il a reçu de l’amour, de l’attention, du soutien. Où sont les lacunes dans l’éducation qu’il a reçu. Quels genres de parents a t-il eu.

C’est important parce que l’enfance est une période de la vie essentielle et qui dure un temps très long. L’enfant n’ayant pas la même notion du temps que l’adulte, chaque année qu’il traverse dure plusieurs années d’adulte dans son expérience. Et l’enfant étant un être extrêmement sensible, toutes les tempêtes qu’il va traverser durant ces années de croissance auront un impact fort sur sa personnalité en construction.

Les parents sont ceux qui vont lui donner ses premiers repères et son premier système de valeurs. La transmission parentale s’opère donc d’abord sur un plan inconscient, car le tout petit enfant gardera dans sa personnalité la trace de l’éducation qu’il a reçu très jeune, à une époque dont il ne peut plus se souvenir. Et également, si à un âge précoce il a vécu des tempêtes, elles resteront marquées en lui et pourront faire le lit d’insécurités qui feront bientôt partie de son caractère. D’où le terme de parents intérieurs.

transmission

Le couple des parents intérieurs

L’idée de couple induit l’idée d’une répartition : les deux se répartissent la tâche de l’éducation de l’enfant. Aussi, chaque couple étant unique, il faudra regarder comment le couple fonctionnait et comment les aspects de l’éducation ont été répartis pour observer sur un plan psychique, la “partition” de la psyché de l’adulte.

La mère

Sur un plan psychologique, la relation à la mère va avoir une influence au niveau des sphères émotionnelles, relationnelles, affectives, imaginaires et intuitives. Si l’enfant a reçu ce dont il avait besoin dans ces domaines là, il aura une facilité à créer des relations, à exprimer sa créativité, ses émotions et ses besoins, à naviguer de manière fluide dans la vie, à être en empathie et à prendre soin de lui.

S’il y a eu un déséquilibre dans un sens ou dans l’autre, des difficultés dans ses domaines là peuvent se faire jour. Le déséquilibre peut être dans un sens où dans l’autre et aboutir au même résultat. Par exemple on peut avoir du mal à entrer en relation soit parce qu’on a été surprotégé et donc en quelque sorte étouffé par la mère, et qu’on est dans une attitude d’attirance-répulsion face au fusionnel, soit parce qu’on a manqué de contact physique et de douceur de la part de la mère et que c’est donc quelque chose qu’on ne connait pas.

De même on peut avoir du mal à s’exprimer, soit parce qu’on a eu une mère intrusive à qui on devait tout dire, soit parce qu’on n’a jamais eu la réception pour être entendu dans sa vérité et qu’on a dû se taire.

Une même conséquence peut donc être dû à un excès dans un sens ou dans l’autre. Je vous ai donné ces exemples pour vous montrer l’importance pour l’analyste, d’aller creuser un peu en posant des questions de temps en temps pour voir de quel côté la balance aurait pu pencher.

Le père

Sur un plan psychologique, la relation au père va influencer le rapport qu’on entretient au fait d’agir, de construire, d’exprimer des idées, d’atteindre les objectifs qu’on se fixe, de se sentir capable, d’être stable financièrement et fiable de manière générale.

Une personne qui aurait bénéficié d’un modèle paternel plutôt sain, n’aurait pas de difficulté particulière à élaborer un projet et à le mener à son terme, à se donner les moyens de réaliser ce qu’elle désire, à faire valoir son point de vue dans un groupe, à être là où on l’attend, à être consciente de ses atouts.

S’il y a eu un déséquilibre dans un sens ou dans l’autre, ça deviendra plus compliqué. Encore une fois, que le déséquilibre soit dans l’excès ou dans le manque, le résultat peut être le même, d’où l’importance de creuser et de ne pas en rester à l’apparence du problème.

Par exemple, un adulte peut avoir du mal à terminer une tâche qu’il commence, soit parce que le père lui-même n’a jamais réussi à se donner les moyens de ses ambitions, soit au contraire parce que le père était un bourreau de travail extrêmement dur et que son enfant n’a pas envie de lui ressembler.

Ou encore, quelqu’un qui aurait eu une image paternelle peu fiable pourra soit devenir quelqu’un de pas du tout fiable non plus, soit au contraire un personne droite et disciplinée à l’extrême.

Maintenant que vous avez compris le principe, vous imaginez mieux à quel point l’analyse du couple parental est importante pour aller observer comment ce qu’ils ont transmis à leur enfant a pu continuer à exister dans sa psyché, sous forme d’imitation, autrement dit en prolongeant les valeurs ou les lacunes transmises, ou à l’inverse sous forme de rejet, en prenant le contrepied du modèle familial. Le couple parental initial continue d’exister sur un plan psychologique en tant que cadre de référence, c’est ce qu’on appelle les parents intérieurs.

L’animus et l’anima

En psychologie analytique, on utilise deux archétypes pour désigner les énergies féminine et masculine de la psyché.

L’animus désigne l’énergie masculine de la psyché, l’énergie Yang. L’anima désigne l’énergie féminine de la psyché, l’énergie Yin.

Nous avons tous en nous une énergie féminine et une énergie masculine. Et ces énergies se sont construites sur la base du couple parental. Par imitation, comme nous venons de le voir, ou bien en opposition.

Mais ces énergies ne sont pas figées, elles sont changeantes. Elles bougent au gré de notre évolution, et leur métamorphose régulière est nécessaire pour notre santé mentale. C’est ici que nous allons pouvoir reprendre la phrase de Jung pour mieux comprendre ce qu’il entend par là.

parents intérieurs

“… Ce ne sont pas son père et sa mère qui lui barrent la route, […] c’est lui-même…”

Je cite à nouveau la phrase de Jung afin qu’on puisse maintenant l’analyser.

« La thérapie ne commence qu’à partir du moment où le malade se rend compte que ce ne sont pas son père et sa mère qui lui barrent la route, mais que c’est lui-même, c’est-à-dire une partie inconsciente de sa personnalité, qui prolonge et perpétue le rôle du père et de la mère. »

Certains, en lisant cette phrase ont pu se dire : “Pff, avec les parents que j’ai eu, j’aimerais bien voir ce que Jung aurait dit…”

Que vous ayez eu des parents distants, absents, durs voire maltraitants, Jung ne dirait pas autre chose.

Ce qui est à entendre dans cette phrase, c’est vraiment l’essence du travail en analyse jungienne. Une fois qu’on a un bon aperçu du lien qui unissait l’analysant avec son père et avec sa mère dans la première partie de sa vie. Une fois qu’on a vu si dans ses comportements et dans chacun des domaines de sa vie (professionnel, relationnel, sentimental etc) il se positionnait plutôt dans une imitation du modèle ou dans un rejet du modèle. On a déjà comme un “plan” de l’organisation des énergies féminines et masculines dans sa psyché.

Et tout ce qui intéresse l’analyste jungien, c’est l’organisation de la psyché de la personne au présent, c’est-à-dire aujourd’hui et maintenant, au moment de l’analyse.

Les parents intérieurs ne sont pas les parents actuels

Il y a des personnes qui ne changent pas beaucoup. C’est ainsi. Il y a des personnes en revanche qui vont être amenées à beaucoup changer au cours de leur vie.

Que vos parents fassent plutôt partie de la première ou plutôt de la seconde catégorie, quoi qu’il en soit aujourd’hui, ils sont forcément différents des individus qu’ils étaient 30, 40 ou 50 ans en arrière. Ils se sont certainement améliorés, adoucis, assagis, ou ils ne sont plus là.

Pourtant, les contraintes qu’ils ont posées il y a 30, 40 ou 50 ans continuent à vous influencer, alors même qu’ils ne sont plus comme ça. Pourquoi ? Parce que vos parents intérieurs sont assez différents de vos parents actuels. Vos parents intérieurs sont les parents qui ont accompagné votre croissance. Ils sont comme figés à une époque lointaine, à une époque révolue où vous étiez dépendants d’eux et soumis à leurs lois.

Alors pourquoi certains, quand ils font une analyse, ont besoin de régler leurs comptes avec leurs parents réels ?

En analyse, la parole se libère, la langue se dénoue. L’analyse pose le cadre bienveillant où la confidence est rendue possible. Et quand on commence à parler, des souvenirs peuvent remonter, des liens se faire… Il est donc naturel d’avoir besoin de mettre les point sur les i avec sa famille ou avec les personnes qui nous ont vu grandir à un moment donné, pour réhabiliter la sensibilité de l’enfant qui n’avait pas alors les ressources de s’exprimer.

Si donc le besoin est là, il faut l’écouter. Il s’agit de faire valoir les droits de l’enfant intérieur, et il n’y a sur le plan psychologique, aucune prescription.

parents intérieurs

Et après ? S’attaquer aux parents intérieurs !

Si donc le besoin de faire un point avec ses parents est là, il faut l’écouter. Cependant ce n’est pas en exprimant à ses parents les reproches qu’on aurait à leur faire, ou en leur confiant des choses qui nous ont blessées et qui nous hantent, que l’affaire est réglée et l’analyse terminée.

On peut même dire qu’à ce stade, tout le travail reste à faire.

Puisque donc les parents intérieurs sont différents des parents qui eux dans la vraie vie ont vieilli et changé, il va donc falloir rentrer en Soi pour affronter ses parents intérieurs, comprendre la manière dont ils influencent l’estime qu’on a de soi-même et leur donner les conditions de se métamorphoser.

Par exemple, si j’ai eu une mère maltraitante et un père dévalorisant, j’aurais peut-être tendance moi aussi à être méchante par réflexe, pour me protéger, ce qui est compréhensible. Mais ce comportement me sert-il? Non il me cause du souci, les gens se détournent de moi. Est-ce que le fait d’être méchante efface mon enfance douloureuse? Non, au contraire, ça la maintient actualisée. Est-ce que ça me permet de ressentir qu’en faisant ainsi je prends ma revanche sur ma mère et mon père ? Non parce qu’ils ne sont plus là de toute façon. Et quand ils étaient encore là, j’avais trop peur d’eux pour oser leur parler mal. En fait, en réagissant ainsi, je me fais du mal à moi en premier, et je continue à m’infliger de la maltraitance en perpétuant celle que j’ai subie pendant des années…

C’est un exemple un peu extrême mais tiré d’une situation que j’ai connue avec une personne que j’ai suivie. On voit bien ici que ce ne sont plus les parents qui comme disait Jung “barrent la route”. “…c’est l’individu lui-même qui, c’est à dire une partie inconsciente de sa personnalité, qui prolonge et perpétue le rôle du père et de la mère.”

Ainsi je suis d’accord avec Jung quand il dit que la thérapie ne démarre réellement qu’à partir du moment où il y a une prise de conscience de cet ordre là. Ce ne sont plus mon père et ma mère le problème. Ce sont la trace qu’ils ont laissé dans la structure de ma personnalité et qui maintient l’ordre ancien actualisé.

Quand on a compris ça, on peut voir chacune de nos réactions ou comportements problématiques comme une occasion de remonter à l’origine de ce qui l’engendre pour ensuite se libérer de notre dépendance inconsciente à un système de valeur hérité, en ressentant vraiment qu’on a parfaitement le droit – voir dans certains cas le devoir – de s’en débarrasser, ou du moins de se débarrasser de ce qui n’est pas en adéquation avec nos valeurs profondes et individuelles.

Merci de m’avoir lue,

Faites de beaux rêves et notez les !

Léa Le Gall


Si cet article vous a plu, je vous invite à regarder mes vidéos sur Youtube à propos du rêve et de la psychologie analytique de Carl Gustav Jung

Voir la chaîne YT de Léa Le Gall


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Catégorie(s) : Psychologie jungienne


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